L’État a organisé les régimes des fonctionnaires. Il n’a imposé, par ailleurs, que des régimes à vocation limitée destinés à assurer le minimum.
Sommaire
Des régimes étagés
Cette seconde démarche a donné naissance à un régime général qui n’est autre que l’ensemble des règles qui organisent l’assurance vieillesse de la sécurité sociale.
En dépit de son qualificatif, celui-ci ne s’impose pas à tout le monde. Certaines professions ont en effet continué à bénéficier de régimes particuliers gérés par des organismes ad hoc.
On les qualifie habituellement de régime spéciaux de sécurité sociale dans la mesure où ils jouent, au profit de la profession considérée, le rôle tenu par le régime général auprès du plus grand nombre.
Alors s’est appliqué ce que l’on pourrait appeler la loi du développement continu de la prévoyance, loi que l’on pourrait énoncer ainsi : « Plus la prévoyance se développe, plus les individus acquièrent une conscience claire de leurs besoins et prennent goût à la protection, de sorte qu’ils cherchent sans cesse à augmenter cette dernière ».
Les régimes de sécurité sociale ont donc été rapidement jugés insuffisants et les intéressés ont entrepris de les compléter.
Ainsi sont nés des régimes censés compléter le minimum mis en place par les pouvoirs publics, ce minimum faisant alors figure de régime de base et les nouveaux venus recevant naturellement le qualificatif de régimes complémentaires.
On n’allait évidemment pas s’arrêter en si bon chemin, de sorte que sont ensuite nés des régimes supplémentaires.
Des régimes socioprofessionnels
Mais, au niveau du complémentaire et, plus encore, du supplémentaire, l’État a laissé les partenaires sociaux se débrouiller entre eux.
L’essentiel s’est donc passé entre grandes organisations syndicales et patronales, des compagnies d’assurances prêtant souvent leur concours technique et l’État donnant, pour finir, force de loi aux accords signés, selon le mécanisme traditionnel de l’extension des conventions collectives.
Prenons l’exemple des cadres. Ce sont des salariés. En tant que tels, ils bénéficient du régime d’assurance de la sécurité sociale, dit régime de base.
Tout en étant salariés, ils exercent des fonctions de responsabilité et perçoivent des salaires très sensiblement supérieurs à la moyenne.
De ce fait, ils acquièrent des habitudes de vie que leur rendraient sans doute particulièrement pénible la nécessité de vivre avec les seuls versements de la sécurité sociale.
De longue date, certaines grosses entreprises ou branches industrielles avaient, en conséquence, créé des régimes de retraite à l’usage de leur personnel d’encadrement.
Afin d’étendre le système à l’ensemble des cadres, leurs associations signaient, le 14 mars 1947, avec le Conseil National du Patronat Français, un accord généralisant et organisant un régime de retraite complémentaire propre aux cadres.
Des régimes supplémentaires
Par la suite, certains cadres supérieurs ont trouvé encore insuffisant, le total « régime de base + régime complémentaire ».
A leur usage, ont donc été mis sur pied des régimes supplémentaires déjà évoqués. Ils sont, pourrait-on dire, « semi-obligatoires ».
En effet, les entreprises ne sont pas obligées d’y adhérer. Mais quand elles l’ont fait, elles ne peuvent plus revenir en arrière et sont dans l’obligation de continuer à cotiser.
Ce sont précisément ces régimes supplémentaires que nous avons situés, en début de chapitre, à la frontière du monde des retraites et de celui des prestations ne méritant pas l’appellation du monde de retraites.
Un accord des non-cadres
Les cadres ont été imités et, en 1961, les non-cadres signaient un accord semblable. Il fut suivi de plusieurs autres, qui aboutirent à rassembler les institutions de retraite des non-cadres sous la houlette de l’Association des régimes de retraite complémentaires, ou ARRCO, organisme déjà nommé.
Certaines professions étaient néanmoins restées hors du champ de ces accords et leurs salariés se considèrent de ce fait comme défavorisés.
L’État a pris leurs regrets en considération et a décidé, par la loi du 29 décembre 1972, que tous les salariés bénéficieraient, à un titre ou à un autre, d’un régime de retraite complémentaire.
Le schéma, que nous traçons très sommairement ici, s’est d’ailleurs peu à peu compliqué. Ainsi, pour éviter que les entreprises ne réussissent à s’échapper aux cotisations des non-cadres en les nommant cadres, il a été décidé que ces derniers devraient aussi être affilés à un régime ARRCO, ils bénéficient donc de trois ou de quatre régimes de retraite qui se complètent mutuellement, les trois premiers étant obligatoires et le dernier facultatif.
Pendant ce temps, les indépendants n’étaient pas restés les bras croisés. Certes, jusqu’à une époque très récente, les commerçants et artisans n’ont pas pu faire ce qu’ils voulaient en raison des difficultés dues à l’évolution des structures commerciales, mais les professions libérales se sont largement inspirées de l’exemple des salaires.
Elles bénéficient d’un régime de base commun à la plupart d’entre elles. Toutefois, ce régime ayant été jugé insuffisant, les notaires, médecins, pharmaciens, architectes, etc., ont pris l’initiative de créer des régimes complémentaires auxquels ils sont tenus d’adhérer et qui complètent le régime de base.